L'hydrologie régénérative ou comment restaurer les cycles de l'eau à la ferme

Publié le 26/01/2024
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Depuis deux ans, le réseau paysan Civam du Finistère propose une formation à l’hydrologie régénérative. Cette approche au carrefour de l’hydrologie, de la géologie, de l’agronomie se fixe pour objectif de restaurer les cycles de l’eau douce en passant notamment par un réaménagement des fermes. 

Une émission mensuelle de Lem, la quotidienne, réalisée en partenariat avec le réseau Civam du Finistère

La formation a connu un grand succès au Civam du Finistère et de nouvelles demandes ont émergé rapidement. Pourtant l’hydrologie régénérative est une approche récente. Portée par une association, elle a fait l’objet d’un colloque à Annecy en 2022. Elle est mise en pratique dans la Drôme par le bureau d’études PermaLab et elle se fait connaître progressivement dans l’ensemble de la France. Fondée par un ensemble de scientifiques en hydrologie, hydro-géologie, géologie, agronomie, topologie, écologie, biologie, mais aussi spécialistes en aménagement du paysage et urbanisme, l’hydrologie régénérative se définit comme la « science de la régénération des cycles de l’eau douce par l’aménagement du territoire ».

Plusieurs cycles de l’eau douce à restaurer

Son objectif est de travailler très finement sur les cycles de l’eau douce. On connaît bien le cycle global : évaporation de l’océan, formation des nuages qui donnent des précipitations sur les continents, ruissellement des eaux et infiltration dans les sols jusqu’à réalimenter (plus ou moins rapidement) les rivières dont les eaux se jettent enfin dans l’océan.

Cependant, il existe aussi un autre cycle de l’eau, qualifié de cycle de l’eau verte, qui lui ne passe par l’étape « eau de mer » : l’évapotranspiration des plantes (arbres en particulier) qui peut être restituée à l’atmosphère sous forme de d’humidité ambiante ou carrément de « pluie d’arbre ». Cela se produit notamment dans les forêts d’Amazonie. Les deux tiers des précipitations viennent en fait de l’évapotranspiration plutôt que de l’évaporation de l’eau de mer.

Les intérêts de l’hydrologie régénérative

Cette meilleure connaissance des cycles de l’eau nous conduit à réexaminer l’importance des végétaux, mais aussi des autres acteurs qui interviennent dans ces cycles, comme les micro organismes du sol qui modifient sa structure et donc la vitesse d’infiltration.

Cela conduit à repenser l’aménagement en général et en particulier celui des exploitations agricoles.

Restaurer les cycles de l’eau présente plusieurs intérêts : améliorer le stockage de l’eau sur un terrain et un territoire pour limiter les impacts des sécheresses ; en Inde, des paysans qui ont retravaillé massivement leurs fermes ont fait littéralement revenir les pluies.

À l’inverse, en cas de fortes pluies (orages ou précipitations abondantes comme certains hivers finistériens), il s’agit aussi de limiter le ruissellement, de faire « zigzaguer » l’eau sur un terrain, et de permettre son stockage très local dans des mares, zones humides ou zones végétales.

Un grand chambardement agricole

Appliquer vraiment sur le terrain l’hydrologie régénérative suppose de repenser totalement les méthodes agricoles, y compris les plus anciennes comme le drainage, et d’autres plus récentes comme le remembrement.

Le Keyline design redessine littéralement les paysages et suppose une vision très différente des cultures ou élevages. Lesdits paysages sont en tout cas diversifiés et visuellement très attrayants. Leur physionomie remet en cause certaines pratiques et l’utilisation de certains engins agricoles.

Il s’agit aussi bien de retrouver d’anciens savoir-faire paysans que de s’appuyer sur les nouvelles données scientifiques. Il faut aussi s’adapter selon les régions du monde.

Dans le Finistère, quelques précurseurs s’intéressent à la question comme les Leroux, qui produisent du lait à Rosnoën. L’agriculture de conservation des sols (semis de couverts végétaux avec les céréales, non labour) et le maraîchage sans travail du sol, l’agroforesterie, sont des étapes préalables vers l’hydrologie régénérative.